dimanche 14 janvier 2007

VERITE - LE RESISTANCIALISME

A la Libération en 1944, la France est déchirée, exsangue à la suite de l’Occupation.

Il fallait pourtant reconstruire le pays et restaurer la cohésion nationale alors que la population avait été partagée entre passivité, résistance et collaboration.

Pour parvenir à son objectif, le général De Gaulle met en place le « mythe du résistancialisme » dans son discours lors de la Libération de Paris. Il véhicule l’idée selon laquelle tous les Français ont résisté et ont participé à la libération de leur pays. On supprime le régime de Vichy de la mémoire collective : Vichy, ce n’était pas la France, la France c’était le général de Gaulle en exil à Londres.

Des tribunaux sont mis en place pour juger les collabos. Cependant, ces derniers sont graciés pour éviter que des exécutions ne viennent briser le mythe national. Il y a ainsi la création d’un sentiment de refoulement national.

Mais, s'il insiste à tort sur le rôle des résistants armés, le mythe gaulliste fait de nombreux oubliés : tous les résistants juifs, démocrates, catholiques…, ceux qui ont résisté de façon pacifique, les prisonniers de guerre, les déportés du STO ainsi que les déportés raciaux (noirs, juifs, mais aussi homosexuels), sont oubliés au profit des déportés politiques.

Malgré tout, le mythe persiste : le cinéma le traduit avec la production de films comme "La Grande Vadrouille" , où tous les Français sont des résistants malgré eux et où les Allemands sont représentés comme de pauvres imbéciles.

L’apogée de ce mythe est atteint lorsque Jean Moulin est mis au panthéon en 1964. Cela représente la consécration de toute une France résistante. Cependant, on oublie le fait que Moulin a été trahi par des résistants eux-mêmes, à Lyon, en 1943.

Il faut attendre l’apparition d’une génération qui n’a pas connue la guerre, et la mort du général de Gaulle, en 1969, pour que le refoulement cesse. Ironiquement, c’est le cinéma qui, après avoir véhiculé le mythe, va y mettre fin. Le film documentaire "Le Chagrin et la Pitié" dévoile la vie des habitants d’un village sous l’Occupation. Ce film de 1971, prévu à la base pour la télévision, est censuré car il dévoile une lourde vérité : les Français ont en grande majorité été des lâches puisqu’ils sont restés passifs ; certains étaient opposés à la résistance, et ont dénoncé des juifs, leurs voisins… Ce film met les gens en face de la réalité de leurs actions, il confronte les gens au refoulement. Il eut un tel retentissement qu’il fut finalement retransmis à la télévision quelques années après, marquant ainsi la fin du mythe résistancialiste.

Voilà un exemple du fait que l’Histoire, que nous considérons comme une science objective, ne l’est pas forcément, puisque le passé peut facilement être utilisé pour des projets politiques, ou au nom d'une pseudo bonne conscience collective.

Nous sommes logiquement amenés à nous interroger sur tous les passages de notre histoire commune qui ont été transformés de cette façon...

1 commentaire:

Emma & Steph a dit…

Il me semble gouter à nouveau à une petite conversation dominicale ... Tu nous préparais mentalement à accueillir cette bouleversante vérité ?
En attendant je me demande comment tu trouves le temps de bosser, passer tout un week-end avec tes potes et publier tout ça !