lundi 14 novembre 2005

LE PHONOGRAPHE DU PETIT SAUVAGE - RAY CHARLES "LIVE AT THE OLYMPIA 2000"


S'il n'y avait qu'un disque à retenir dans la discographie de l'immense Ray Charles, je dirai qu'il faut retenir celui là.

Le choix n'est pas facile, et il est motivé par plusieurs raisons.

Ray Charles n'a joué que deux fois, dans toute sa carrière, à l'Olympia. La première fois, en 1960, en plein dans la fulgurante ascension de son succès planétaire. La seconde fois en 2000, pour ses 70 ans, dans l'aube du 3ème millénaire.

C'est un Ray Charles aux cheveux blancs et à la démarche un peu fatiguée qui monte sur scène. C'est un Ray Charles enflammé, possédé par sa musique, qui secouera l'Olympia ce soir là.

Mais ce concert, au délà du fait qu'il ait eu lieu pour les 70 ans du Génius, et qu'il marque ses retrouvailles avec la mythique salle française, ce concert, donc, a vraiment une histoire particulière.

Ray Charles était en tournée en France, et avait d'abord joué à Juan les Pins. De là, il devait prendre l'avion avec son orchestre (une quarantaine de musiciens), ses Raylettes (les choristes), son manager, son producteur, bref, beaucoup de monde.

Seulement, le jour du départ, paf, c'est la grève à Air France, et la plupart des vols sont annulés.
Ray prend alors l'avion avec son manager et les trois musiciens de sa formation de base (guitare, basse, batterie) sur le seul vol sur lequel il reste quelques places, en pensant que le reste de la troupe suivrait plus tard, au pire, le lendemain matin, jour du concert à l'Olympia.

Les voilà donc tous les cinq arrivés à Paris, l'orchestre étant coincé sur la côte à cause de la grève.

Le lendemain, malheureusement, la situation sociale n'a pas évoluée, et Ray Charles apprend que son orchestre est toujours bloqué à 900 kilomètres de l'Olympia et qu'il va probablement falloir annuler le concert.

Et, à 70 ans tous justes révolus, après plus de 50 ans de musique, Ray Charles, qui n'a plus rien à prouver, et qui n'est pas à une scène près, prend alors une décision et un risque surprenant: il décide de maintenir le concert, pour "ne pas décevoir les gens qui sont venus pour le voir".

Après des dizaines d'années de concerts en formation "orchestre et choeurs", Ray Charles décide donc, à quelques heures de son entrée sur scène à l'Olympia, de retravailler avec son bassiste, son guitariste et son batteur, en façon quartet les morceaux arrangés pour être joués en big band.

Et c'est ainsi que, ce soir là, le public a pu découvrir, de la façon la plus innatendue possible, un Ray Charles revenu à ses racines musicales, jouant dans une formation à quatre, telle qu'à ses débuts.

On découvre les grands classiques du répertoire de Ray joués d'une manière pure, simple, et intime, comme dans une cave voûtée d'un petit club de jazz où il n'y aurait que quelques dizaines d'amateurs et autant de bouteilles de bourbon.

On entend la voix épurée, chaude et pleine de nuances du Génius, on devine presque le toucher de ses doigts sur les touches du clavier.

On retrouve la spontanéité d'un quartet qui joue en direct, et parfois, même, ça sent la jam session.

Bref, ce concert à l'Olympia est un concentré de musique pure et claire, de jazz, de blues, de country, de gospel, de rythm n' blues, un bijou innatendu dû à une grève surprise et à l'amour inconsidéré de Ray Charles pour sa musique et son public.

C'est aussi la seule fois, sans doute, dans toute l'Histoire du Mouvement Social en France, qu'une grève aura été d'une quelconque utilité...

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Pour Air France: hip hip hip.....

LE ZUBIAL a dit…

HOURRRRAAAAAAAAAAAAAA!!!!!!